Les partis politiques de l’opposition ivoirienne, les
organisations de la société civile et les personnalités politiques regroupés au
sein de la plateforme non idéologique dénommée Coalition pour la Démocratie, la Réconciliation et la Paix, en
abrégé CDRP, ont produit le présent
Manifeste.
Ce document traduit les analyses partagées et les
engagements pris par les membres de cette coalition en vue de restaurer et de
consolider l’Etat de droit, la démocratie, la bonne gouvernance, la
réconciliation et la paix sociale.
En effet, notre pays la Côte d’Ivoire a atteint, à
travers la gouvernance du pouvoir actuel, un niveau de régression sans
précédent.
La pauvreté s’est accrue. La sécurité des biens et des
personnes est régulièrement menacée. Le pouvoir exécutif et le RHDP unifié
s’immiscent sans cesse dans le fonctionnement de l‘appareil judiciaire. La
gestion du pouvoir RHDP unifié se caractérise par des dérives dans tous les
domaines de la vie de la nation.
C’est pourquoi, il est impérieux d’en prendre courageusement
conscience pour restaurer l’Etat de droit, la démocratie, la réconciliation et
la paix.
I ANALYSE DE LA SITUATION
SOCIO-POLITIQUE NATIONALE
I.1 DES
DERIVES AU PLAN DEMOCRATIQUE
En Côte d’Ivoire, le pouvoir RHDP unifié a brisé
progressivement tous les ressorts de la cohésion nationale de la paix sociale
et ébranlé l’unité Nationale.
En effet, l’on assiste à une violation constante de la
Constitution et des lois de la République.
De nombreux acteurs politiques, civils et militaires
sont arbitrairement arrêté et maintenus en détention sans jugement.
Toutes les institutions de la République sont devenues
des instruments au service du pouvoir autocratique RHDP unifié.
Ce régime de terreur multiplie les atteintes graves à
la démocratie, aux libertés fondamentales, à l’Etat de droit et aux droits
humains.
Toutes ces atteintes qui entravent la liberté
d’expression individuelle et collective dans l’espace public sont de nature à
empêcher une élection présidentielle crédible et transparente en 2020.
Pour illustrer cette affirmation, l’on peut rappeler
que les ivoiriens assistent avec indignation à :
- l’incapacité du Gouvernement et des services publics
à produire, à bonne date, des cartes nationales d’identité, pièces essentielles
pour l’inscription sur la liste électorale des citoyens en âge de voter;
- la mise sous tutelle, de façon arbitraire, de
certaines communes remportées par des partis politiques de l’opposition, lors
des élections municipales et régionales d’octobre 2018 ;
- des arrestations répétées de citoyens exprimant des
opinions sur des faits de la société ivoirienne et d’élus en dépit de leur
immunité parlementaire ;
- des procédures judiciaires abusives engagées contre
des élus et des anciens membres de gouvernement, au mépris de leurs immunités
parlementaires ou de leurs privilèges constitutionnels.
Dans sa farouche volonté de s’assurer un règne sans
partage, le régime au pouvoir, lors des élections municipales et régionales
d’octobre 2018, n’a pas hésité à recourir à des fraudes massives et
systématiques, à des intimidations et à des violences, ayant souvent conduit à
des pertes en vies humaines.
Les dernières élections ont surtout été marquées par
des inversions éhontées de résultats.
Par ailleurs, après avoir écarté l’Opposition majoritaire
des discussions sur la réforme de l’organe en charge des élections, le régime
au pouvoir, avec une arrogance intolérable, a installé une nouvelle Commission
Electorale totalement à sa dévotion, en flagrante violation des exigences de la
Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, qui avait, dans son arrêt
du 18 novembre 2016, enjoint l’Etat de Côte d’Ivoire d’opérer une réforme
profonde de cette Institution afin qu’elle retrouve un caractère impartial,
autonome et indépendant.
I.2. DES
DERIVES AU NIVEAU DE L’ADMINISTRATION PUBLIQUE
A l’indignation générale, le chef de l’Etat lui-même,
au mépris de son devoir absolu d’équité, a instauré une politique sectaire,
faite d’injustices sociales manifestes, perpétrées notamment dans les nominations
aux hautes fonctions de l’Administration.
Ces pratiques, jusque-là inconnues dans notre pays,
accentuent la fracture sociale et entraînent une sorte de ségrégation entre les
citoyens.
I.3. DES
DERIVES DE LA GOUVERNANCE ECONOMIQUE
L’économie du pays, naguère reconnue pour son
dynamisme, est aujourd’hui l’objet d’une prédation éhontée.
En effet, elle fonctionne comme un vaste système de
captation de ressources et de privilèges, au service d’un cercle fermé proche
du pouvoir.
Les forêts ivoiriennes, véritables
socles nourriciers des communautés rurales et paysannes sont l’objet de
nombreuses expropriations et occupations illicites, provoquant une dangereuse
déstructuration sociologique et économique de nos campagnes.
Ce régime d’une autre époque a réussi l’exploit de
l’appauvrissement de nos braves paysans par la mévente de certains produits de
rente, notamment l’anacarde et l’hévéa ainsi que par l’absence de soutien au
prix du cacao.
En outre, pendant que la dette ivoirienne croît de manière
exponentielle à travers des emprunts massifs, l’on assiste à des dépenses
publiques non productives qui compromettent dangereusement la réduction du coût
de la vie et l’avenir des générations futures.
Cette mauvaise gouvernance est visible à travers les
statistiques suivantes :
- un taux de chômage de 70 à 90 % de la population en
âge de travailler selon la BAD ;
- un PIB de 8 % en 2012 qui est en baisse à 7,7% en
2017 et 7,4% en 2018 selon le Trésor Public français ;
- un classement de 170ème pays sur 189 en 2018 au
regard de l’Indice de développement humain ;
- un taux de pauvreté de plus 46 % selon la Banque
Mondiale et de 48 % selon la Banque de France ;
- un taux de suicide le plus important en Afrique et
le 5èmedans le monde selon l’OMS ;
- un taux d’endettement qui est passé au-dessus de la
barre moyenne de 50 % des taux d’endettement des pays africains.
Elle est également caractérisée par un niveau de
corruption élevé qui gangrène le tissu économique national.
Au demeurant, la mauvaise gouvernance économique
compromet le bien-être des populations ivoiriennes, particulièrement celle du
monde rural.
I.4. DES
DERIVES AU NIVEAU DE L’EDUCATION-FORMATION
L’école ivoirienne est en profonde
régression.
Cette régression est caractérisée
par :
- l’inéquation formation-emploi ;
- la massification grandissante due
à un financement insuffisant et une gouvernance approximative ;
- la production de manuels scolaires
truffés de fautes ;
- la tricherie à grande échelle et
le marchandage des épreuves observés lors des examens et concours ;
- la corruption de certains
partenaires du système éducatif ;
- la violence et l’insécurité en
milieu scolaire et universitaire ;
- le décalage des années
universitaires dû aux retards de programmation des examens des années
antérieures ;
- la mise en place d’un système
d’enrichissement illicite à travers des doubles inscriptions (en ligne et
physique).
Ainsi, l’école ivoirienne s’effondre
chaque jour sous nos yeux, condamnant la jeunesse ivoirienne à un recul
intellectuel et à une incompétence dans l’exercice des charges publiques et
privées. Ce qui engendre la perte de la valeur des diplômes
universitaires et professionnels ivoiriens.
I.5 DES
DERIVES AU NIVEAU DE LA SECURITE
Depuis l’avènement du pouvoir actuel, l’on assiste à
une forte dégradation de la situation sécuritaire dans notre pays. Chaque jour,
de nombreux citoyens ivoiriens sont, sous le regard impassible, voire complice
des autorités du pays, l’objet d’agressions sauvages perpétrées par des jeunes
délinquants surnommés ‘’microbes’’, qui foisonnent et sévissent sans pitié dans
une inexplicable impunité dans nos villes.
Dans le même sens, le phénomène de coupeurs de route
s’amplifie sur de nombreux axes routiers à l’intérieur du pays, et ce, dans
l’indifférence totale des pouvoirs publics.
Tous ces faits regrettables portent sérieusement
atteinte à la sécurité intérieure.
I.6 DES
DYSFONCTIONNEMENTS AU NIVEAU DE LA SANTE
Dans le domaine de la santé, les hôpitaux, encombrés,
avec des plateaux techniques dépassés, subissent un rationnement budgétaire
extrême.
Les centres de santé, sous équipés, n’offrent pas les
soins de santé primaires propres aux principes de la couverture maladie
universelle instaurée par le Gouvernement depuis 2014.
Les hôpitaux sont dégradés et encombrés avec un
personnel de santé à bout de souffle.
Ces centres de santé et hôpitaux totalement dépourvus
d’une offre de soins digne de la Côte d’Ivoire, apparaissent aujourd’hui comme
de véritables antichambres de la mort.
II-APPEL DE LA CDRP POUR LE SURSAUT NATIONAL
Au regard des graves dérives de tous ordres que vivent
les Institutions de la République, l’Economie nationale et les populations, la
Côte d’Ivoire est défigurée et méconnaissable. Elle vit dans l’angoisse et la
peur à quelques mois de l’élection présidentielle d’octobre 2020.
Ainsi :
• vu les atteintes graves aux droits humains, à l’Etat
de droit, aux libertés fondamentales, à la démocratie et à la violation
permanente de la Constitution et des lois, perpétrées par le régime au pouvoir
;
• vu les entraves permanentes et violentes aux
activités de l’Opposition politique ivoirienne, les emprisonnements et
détentions arbitraires ainsi que les décisions de justice en faveur du régime
RHDP unifié, au mépris de l’ordre démocratique républicain ;
• vu la mauvaise gestion des ressources publiques au
sommet de l’Etat, source de fragilisation de l’équilibre budgétaire et
macroéconomique ;
· vu le taux de chômage élevé ainsi que les atteintes
graves au patrimoine forestier et foncier national, si vital pour nos masses
paysannes ;
• vu la paupérisation grandissante des masses
laborieuses, aggravée par une politique discriminatoire qui alimente et creuse
dangereusement les inégalités sociales en Côte d’Ivoire ;
• vu le recours systématique du régime au pouvoir à
l’instrumentalisation des Institutions de la République, des forces de défense
et de sécurité et de la Commission Electorale, pour servir la fraude et
l’inversion des résultats à toutes les élections ;
• convaincus de l'impérieuse nécessité de restaurer
l'unité nationale et la cohésion sociale gravement mises à mal, en vue de
l’instauration d’une paix sociale durable, seul gage de la stabilité du pays ;
• convaincus que tous les citoyens de notre pays, dans
un sursaut énergique et salutaire, ont le devoir de se rassembler pour réaliser
l’Union Sacrée, autour de la Nation
menacée dans ses fondements, en vue de la restauration nationale, la
réconciliation, la paix et la stabilité du pays.
Nous, Partis Politiques de l’opposition, Organisations
de la Société Civile et Personnalités politiques, signataires de la Charte et
du présent Manifeste, refusons avec le Peuple de Côte d’Ivoire, de nous faire
complices de la gouvernance sectaire et destructrice du régime en place :
- sommes déterminés à prendre devant
l’Histoire, toutes nos responsabilités pour restaurer notre Nation en péril ;
- sommes farouchement résolus à préserver les acquis
démocratiques, l’Etat de droit et l’exercice effectif de nos libertés ;
- sommes résolument engagés à rendre aux ivoiriens, le
prestige, la fierté de leur Nation et la volonté de la défendre.
En conséquence,
nous lançons un appel solennel et patriotique à toutes les forces vives de
notre pays, dans toutes leurs composantes à :
- se rassembler pour faire échec au régime du RHDP
unifié, dans son projet inique de démantèlement des fondamentaux de notre pays,
la Côte d’Ivoire ;
- s’unir solidaires et déterminés, pour faire face à
l’adversité qui nous est imposée ;
- réussir par une lutte résolue, à préserver notre
pays du chaos et lui rendre l’assurance de l’avenir radieux que lui ont promis
nos devanciers, ceux-là même qui, par les sacrifices immenses consentis, nous
ont légué une Grande Nation, notre belle Patrie, La Côte d’Ivoire.
Peuple de Côte d’ivoire, sauvons notre Nation et
unissons-nous pour un nouveau contrat politique, Economique et social.
Proclamée à Abidjan, le 28 novembre 2019.